Quantified Epopee est un projet de recherche mené avec Martin De Bie sur de nouveaux modes de narration dans la tapisserie contemporaine. Le projet questionne les conditions de la narration, au regard des nouvelles technologies de l’information et de la communication émergeant dans l’univers de l’art textile.
Quantified Epopee interroge l’impact du numérique sur la tapisserie contemporaine et renouvelle une forme d’artisanat en rétablissant l’usage de l’or et des métaux dans les tapisseries. La tenture de Coriolanus, tissée par le Mobilier National à la demande d’Henri IV avant 1606 est un bel exemple de l’usage de l’or pour rehausser les tapisseries. Le projet tend à valoriser l’héritage culturel de la tapisserie française en encourageant le réemploi de ces matériaux conducteurs. Leur usage au sein des tissages permet d’augmenter les possibilités de narration des tapisseries: elles deviennent des interfaces tactiles, sensibles au toucher et à l’approche, qui interagissent avec les spectateurs.
En tant que projet de recherche, Quantified Epopee explore différentes hypothèses dont résulte de chaque série d’expérimentations une production physique ou théorique présentée lors d’expositions et de conférences.
Un Gramme Chevaleresque
La pièce Un Gramme Chevaleresque, est une tenture qui narre la quête numérique d’un chevalier contemporain, un soldat français en mission. Confectionnée à l’aide d’une machine à tricoter détournée et contrôlée par ordinateur, la tapisserie révèle une iconographie issue de la collecte effectuée sur les réseaux sociaux personnels de ce soldat. À l’arrière-plan, le filtre fleuri de ses selfies Snapchat se mêlent aux treillis militaires de son quotidien. Ses déplacements, repérés en pistant ses posts Facebook, sont représentés par des coordonnées GPS et un tracé. Ses posts, émis depuis les terrains d’entraînement où s’exerce son régiment, sont souvent accompagnés d’images qui le représentent brandissant fièrement des armes lourdes ; les mitrailleuses rythment la tenture.
En frôlant la surface, la main survole des ornements composés de fils métalliques. Avertie par ces capteurs, l’électronique embarquée dans la tapisserie déclenche des plages sonores provenant de vidéos postées par le sujet depuis les camps d’entraînement.
Un Gramme Chevaleresque questionne l’impact des technologies sur l’identité et la citoyenneté. Internet et les réseaux sociaux offrent à l’utilisateur un espace tierce, entre le virtuel et le réel où il peut s’accomplir. La frontière entre vie privée et vie public s’appauvrit, floutant la définition de chacune d’elle.
Un Gramme Chevaleresque, 2017. Tricotage manuel sur machine à tricoter à commande numérique, fils acryliques et argents, 195 x 360 cm. Réalisé au pavillon d’Angiviller, le Mobilier National.